Curieusement il dit exactement ce que je dis sur ce blog depuis quelques années, et confirme toutes mes analyses et il parvient aux mêmes conclusions que moi : sur l'écriture collective qui ne peut convenir à une encyclopédie, sur le faux postulat de la sagesse des foules qui convient dans les situations où il s'agit de résoudre des problèmes pratiques, certes, mais certainement pas pour la connaissance et sa transmission, sur le fait que wikipedia ne dépasse pas le niveau de l'information, - ce qu'il ne faut pas confondre avec la connaissance qui ne lui est pas assimilable-, et que donc, elle ne sera jamais une encyclopédie et ne peut ni ne pourra jamais concurrencer les vraies encylopédies. En termes de qualité du moins. La popularité, c'est autre chose.
Wikipedia n'est pas et ne sera jamais une encyclopédie, nous nous trouvons d'accord avec ce que disent tous les profs. Etonnant n'est-ce pas ? .
N'est-ce
L'étude de Paul Duguit confirme que wikipedia est avant tout un media de diffusion populaire pour les sujets populaires, essentiellement loisirs populaires donc et n'est pas une publication qui oeuvre à la diffusion de la connaissance. (C'est ce que montrent bien ses consultations, de plus, et sans doute possible)
Le professeur et chercheur rappelle que si wikipedia est riche en information, ce dont elle s'ennorgueillit, certes, et qui constitue son auto-publicité permanente (des millions d'articles !) l'information n'est pas la connaissance .
Wikipedia n'est pas une publication qui dépasse le niveau de l'information. Elle n'est pas susceptible d'oeuvrer au développement de la diffusion de la connaissance, selon le professeur Duguit. C'est également ce que je pense et dont j'ai précédemment exposé les raisons.
Quant à son pari d'écriture collective reposant sur le postulat jamais vérifié mais souvent démenti que le nombre supplée l'incompétence. Elle a montré qu'elle ne peut remplacer l'écriture d'un texte par un auteur qui en assure la cohérence, et par un auteur compétent évidemment, pour en assurer l'exactitude et l'intelligence du propos et... éviter des points de vue biaisés.
Wikipedia s'auto-félicite certes, mais elle n'a pas démontré qu'elle pouvait faire mieux que de participer à la diffusion d'informations, complétant utilement Google et rien de plus.
Elle n'a pas démontré que la dite "écriture collective" avait une réelle valeur, tout au contraire.
Elle n'a pas démontré que ses principes de "neutralité" étaient supérieurs à l'exigence de vérité, tout au contraire.
Voici quelques extraits des propos de Paul Duguit dont je recommande la lecture de l'étude à tous les wikipédiens, gradés ou non, et aux quelques profs égarés qui croient qu'ils participent à une encyclopédie au service de la connaissance.
Professeur à l'université de Californie à Berkeley, a écrit avec John Seely Brown, de Xerox, « The Social Life of Information » (« La vie sociale de l'information »), Harvard Business Press, 2000. Il a publié une étude sur Wikipédia et les limites de l'auto-organisation dans la revue en ligne First Monday.
Il commence par ce qui semble faire le plus problème pour lui , le manque de vérité et d'objectivité , du fait du principe de neutralité :
1- problème de l'utilisation de wikipedia à des fins de publicité et de propagande, ce que permet le principe de "neutralité".
" certains actes commis sur Wikipédia, comme l'utilisation de Wikipédia par des compagnies pharmaceutiques ou encore par des hommes politiques (qui modifient l'article les concernant). Ce qui ne veut pas dire que Wikipédia soit neutre.
La « neutralité du point de vue » (NPOV) dont elle se prévaut tend à nous désarmer quand nous cherchons à interpréter un article et permet à des individus et des organisations d'exercer un pouvoir d'une manière qui devrait tous nous préoccuper."
2- mise en doute de la notion de "sagesse des foules" -notion de de Surowiecki"
" si la foule cherche à deviner le poids d'un cochon (il donne cet exemple), on voit la plus forte densité de réponses se grouper autour du bon poids. Mais sur une question comme la date de naissance de Defoe, on ne rencontre pas ce type de distribution.[...] Les gens qui cherchent à deviner le poids d'un cochon dans une foire agricole ont une bonne appréhension intuitive du poids, en raison de leurs connaissances agricoles. Mais demandez à un groupe de gens choisis au hasard le deviner la date de naissance de Condorcet…
3- mise en doute de la pratique de l'écriture collective pour autre chose que l'information.
Yochai Benkler, auteur de « La richesse des réseaux »... exalte la culture des logiciels libres. Il tire de ce milieu l'idée que, si un projet peut être morcelé en unités « modulaires » de petite taille (« granularité ») destinées à être travaillées séparément, ces modules peuvent ensuite être réassemblés et transformer le projet.
Ma thèse est que si cela marche généralement pour les logiciels, c'est beaucoup plus difficile pour les projets culturels. Par exemple, quel est le bon module pour une encyclopédie ? Wikipédia tend à fonctionner comme si c'était la phrase.
Les gens vont donc changer une phrase sans se demander quels effets cela produit sur l'article, encore moins sur l'ensemble de l'encyclopédie. C'est très problématique. Dans l'article sur Defoe, par exemple, on le voyait mourir à une certaine date au début du texte, à une autre date à la fin.
Personne n'avait remarqué parce que personne n'avait considéré l'article lui-même comme un module. De même, quelqu'un va faire un ajout dans un article sans réaliser que cela vient perturber d'autres articles. Dans les ouvrages de référence habituels, ce travail de coordination est fait par les éditeurs et il est essentiel.
4- wikipedia comparée aux autres encyclopédie : plus populaire, c'est certain, mais elle en reste à ce registre. Elle ne réussit pas à traiter la connaissance comme le fait une encyclopédie.
" elle est meilleure que la plupart de ses rivales en matière de culture populaire. Ce secteur est convenablement peuplé (la liquidité dont je parlais), et il existe en général une bonne connaissance des choses en question (où l'on retrouve Condorcet).
Elle peut donc humilier la Britannica sur les icônes populaires et la culture courante. Mais, en général, un article de Wikipédia est loin d'approcher la qualité de la même entrée dans une encyclopédie ou un dictionnaire digne de ce nom. [1]
Je serais surpris, par exemple, de trouver un seul personnage du dictionnaire Oxford des personnalités nationales (Oxford dictionary of national biography) qui soit mieux traité dans Wikipédia. Je pense que c'est dû au fait que ce genre d'ouvrage exige beaucoup de temps et d'organisation pour surmonter les limites de la « modularité » et de la « granularité » que Shirky et Benkler semblent avoir oubliées. "
5- et de manière plus générale, les innovations sur internet, telle wikipedia :
Je pense que les technologies peuvent nous donner un accès à « l'information », mais que la « connaissance » est un bien que nous acquérons par un engagement plus actif.
[...]
Comme toujours avec les concepts de vérité et de fiabilité, il y a un énorme avantage à faire prendre des vessies pour des lanternes. Chaque fois que quelqu'un trouve un nouveau moyen de fournir des ressources fiables, on verra quelqu'un d'autre s'employer à essayer de construire quelque chose qui y ressemble mais qui est trompeur.
[...]
Conclusion que saura comprendre tout bon lecteur.
A bon entendeur...
Alithia.
notes [1] : voilà ce que l'on constate en lisant wikipedia afin d'apprécier la qualité de ses articles et qu'on ne se contente pas d'une comparaison entre 42 articles de sciences exactes comme le fit la pseudo étude comparative de Nature. 42 articles sur des millions, ça parle de soi, et uniquement en sciences exactes sur des sujets très pointus où n'intervient pas n'importe qui, c'est le contraire de wikipedia ouverte à tous et à tous les points de vue, cela va également de soi qu'on ne peut tirer aucune conclusion valide d'une telle étude.
l'artice complet : devient-on plus intelligent à plusieurs ?